Jan 11 2021

« Apavâda » :la réfutation du faux-

 

 

« Sur le plan de la discipline spirituelle, apavâda -la réfutation du faux- est la méthode spirituelle adoptée par les instructeurs védantins pour conduire le chercheur spirituel à la connaissance de l’essentiel.
Dés l’instant ou on affirme un postulat,( ou pour certains l’évidence née d’un éveil…) cette « méthode » consiste à toujours tenir compte de son contraire, en sachant que tous les contraires contiennent tous deux du vrai et du faux.
Apavâda est une application méthodique de la pensée paradoxale qui tend à diriger la pensée vers un état de neutralité, logé au cœur du paradoxe, en lequel la Réalité peut se manifester. »
( l’équivalent de l’apophatisme de la voie gnostique et soufie)

La Voie de l’essentiel,  les Upanishads d’hier à aujourd’hui, Jean Lestchert

 

 

 

 

 

 

« Méthode » destinée aux chercheurs spirituels, mais qu’en est t-il des lors que le processus d’éveil est activé dans nos vies?

 

C’est là qu’a nouveau, « apavâda » est proposé.
Non comme une méthode intellectuelle de recherche spirituelle, mais simplement comme un positionnement intérieur « d’Ouverture automatique », Un Regard D’Amour, une conscience innée de l’Évidence intérieure (ou de l’intuition profonde ) que Tout est Un

.

Face aux multiples « évidences » nées des divers aspects de l’éveil et de ces réalisations particulières qui fondent les diverses voies, la « question reste posée.
Le « problème » n’émerge en fait que lors de la rencontre de perspectives apparemment différentes.
La Réalité de l’Unité les contient toutes. Elle englobe, contient et transcende tous ces « différentes ouvertures », toutes ces réalisations relatives qui sont l’objet de tant d’enseignements divers et parfois apparemment contradictoires

Et ce qui paraissait séparer agit alors comme un koan ..

http://saveurdevivance-voixdesilence.over-blog.com


Déc 31 2020

Destiné

Amor Fati – Aimer son

destin

Aimer son destin revient donc, ultimement, à s’accepter.


Pour tout dire dès le départ, j’ai fini par en avoir assez de consoler les gens… d’être vivants! Il me revient parfois cette réflexion provocante de Sénèque :  » La seule raison qui nous interdise de nous plaindre de la vie, c’est qu’elle ne retient personne « . En définitive, c’est dans sa propre vie et, je dirais en soi-même, que se trouve pour chacun l’enseignement de la vie. Ce qui suppose de vivre sa vie en pleine conscience! De la vivre comme un exercice, comme un entraînement, sans perdre de vue les valeurs et les principes qui lui donnent un sens. Autrement dit, d’accepter son destin, de l’assumer voire, comme le suggère Nietzsche, d’aimer son destin.

 


Tout commence avec le destin, plus exactement, avec l’acceptation de son destin. Ce qui ne va pas de soi, je le reconnais. Sans compter que le destin, c’est non seulement ce qui nous arrive de l’extérieur : les événement qu’on doit traverser, les circonstances qui s’imposent d’elles-mêmes, les conditions avec lesquelles il faut composer – ce qui est déjà beaucoup – mais aussi soi-même. Car on est pour une large part son destin. Ce que je suis détermine en partie ce que je pense : ma vision des êtres et des choses.

On naît avec son tempérament. Il est l’effet des glandes. Dans certaines écoles ésotériques, on soutient même que l’on naît prisonnier de ses glandes. Bien que l’on puisse en altérer relativement le fonctionnement par des drogues : les tranquilisants, les antidépresseurs ont précisément pour objet de modifier le fonctionnement glandulaire. C’est aussi l’effet de l’alcool, du cannabis et d’autres substances qui changent la perception de la réalité. Ce qu’on pourrait aussi dire d’un bon repas et de se trouver en bonne compagnie. Cela dit, il demeure que le tempérament découlant du fonctionnement glandulaire propre à un individu ne peut être profondément altéré sans menacer l’identité, voire en entraîner l’éclatement.

Le tempérament, qui est aussi l’expression du type humain auquel on appartient (nerveux, bilieux, sanguin, etc.), sans oublier le sexe – ce qui n’est pas un facteur négligeable – représente aussi un aspect du destin. On n’échappe pas à soi-même, à ce que l’on est, à la vision que l’on a du monde par l’effet de ce que l’on est, autrement dit de son tempérament.

Aimer son destin revient donc à s’accepter ce qui suppose d’abord de se reconnaître pour ce que l’on est. La liberté toute relative qui peut s’exercer par rapport au tempérament suppose une grande lucidité et une volonté au service de valeurs et de principes bien identifiés : suppose, en somme, un caractère capable de commander un fonctionnement relativement libéré des contraintes du tempérament.

C’est que le caractère, contrairement au tempérament, n’est pas inné mais acquis. Le caractère est l’effet de l’éducation au sens large : de l’effet du milieu psychosocial, de la transmission de valeurs et de principes par la parole ou mieux par l’exemple, de même que de l’effet du travail sur soi suscité par l’expérience. La véritable liberté suppose donc une victoire sur soi. Une victoire qui découle d’une observation lucide des tendances commandées par le tempérament, et de la raison qui intervient de plus en plus au fur et à mesure que se développe le caractère.

Telle est la part de liberté, plutôt mince quand on y songe, dont nous jouissons réellement, alors que nous avons parfois l’impression de penser et d’agir librement. C’est ici un des aspects de la grande Illusion dans laquelle nous nous démenons et dont nous ne pouvons nous tirer – toujours relativement – qu’au prix d’un sérieux travail sur soi. Relativement en effet puisque, au départ, mon tempérament est ma façon d’être.

Aimer son destin revient donc, ultimement, à s’accepter. Et c’est seulement si on s’accepte que l’on peut espérer se changer. Car quiconque parvient à se voir avec un minimum de lucidité ne peut pas ne pas vouloir se changer… à moins qu’on ne soit parfait!

En définitive, je dirais qu’il faut appliquer ici la règle définie par le sage Épictète, et reprise depuis par les alcooliques anonymes, selon laquelle il faut tenter de changer ce qui peut l’être – de ce qu’on juge souhaitable de changer – et d’accepter ce qui ne peut pas l’être. Et ce, non seulement par rapport aux événements, aux circonstances et aux conditions, mais aussi par rapport à soi. Ce qu’on ne peut pas changer, c’est ce que les bouddhistes appellent précisément la fatalité du destin!

… Et je n’ai pas parlé des conditionnements psychosociaux dont il faut aussi se libérer – au moins relativement – afin de jouir d’une certaine liberté. Mais ça, comme disait Kipling, c’est une autre histoire.


Retour au début© Jacques Languirand
Chronique parue dans le Guide Ressources,

Vol. 14 no 04, décembre 1998