Jan 19 2021

NAN YAR

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« Nan Yar » est la question traditionnelle indienne du chercheur, traduite en occident par « qui suis-je ». Mais comme nous l’avons souligné ici, « Nan yar » est plus proche de « Moi? Quoi? », et il est évident qu’à plus d’un titre, la résonance est fort différente. Voyons:

Tout d’abord, la traduction littérale « Moi? Quoi »? ne sonne pas comme une question « foncière » mais comme un étonnement. Par conséquent, première remarque, il s’agit tout autant d’une réponse que d’une question, sans être ni l’une ni l’autre, ne venant pas du « ressort » seul du chercheur mais d’une proposition extérieure.

A celui qui pointe « moi », l’éveillé répond: « Moi? », qui comprend l’étonnement d’être considéré ainsi, le doute à propos de la vérité de cette pensée. Cet étonnement est intéressant car il ne saurait nier ni ne réifier la possibilité d’un tel « moi ». Puis il rajoute « Quoi? » Et là il faut comprendre trois « mouvements » en un: d’une part l’appui de l’étonnement, d’autre part l’extrême restriction de l’intérêt à propos de la présence ou de l’absence de ce « moi » et enfin, et là ça devient intéressant, le fait que « Quoi? » soit en réalité le véritable nom de « moi ».

Ce « quoi? » en tant que véritable nom de « moi » implique, donc, ni l’existence ni la non-existence de « moi » mais sa vacuité, c’est-à-dire Rien. Non pas le « rien » de l’alternative « rien et/ou quelque chose », mais le Rien de la Vacuité universelle, qui n’a nulle contrepartie car elle est à la fois la manière d’être des choses et vide d’elle-même.

Autrement dit, « Moi? Quoi? » est une Réponse non conclusive, une Question sans ressort, sans tension ni interne ni externe, sans appel à un « deuxième moment ». C’est le silence joyeux du sage…

Nous voyons que la question « qui suis-je » est totalement différente, déjà fort orientée, beaucoup moins spacieuse, si je puis dire, disant à la fois trop et pas assez. « Moi?Quoi » n’implique pas l’idée qu’il y aurait quelque chose (ou rien) à être, notre traduction est moins claire à ce propos.

D’autre part, ce « Quoi-nom véritable de Moi » est également le nom véritable de « ceci et cela »: Dogen dit qu’à la question zen « Qu’est-ce qui vient ainsi », la réponse est « Quoi est ce qui vient ainsi ». Quoi a la même charge vide et infinie que précédemment, l’étonnement, vide de mémoire et de schémas, et l’affleurement de ce Rien sans contrepartie.

En tant que Rien, ce « Quoi?! » est Total, un « il y a » total (et par conséquent, pas le « il y a » de l’alternative, mais un « il y a » totalitaire), qui est, ici et maintenant, l’esprit indivisé, la conscience sans objet.

Etudier ce « quoi », ce « Moi? Quoi? », et devenir intime avec jusqu’à ce que le corps devienne le « lieu » de cette vacuité vivante, de l’éternel renouvellement, de l’évanouissement de l’alternative…

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