Mar 3 2021

Krishnamurti – Voir : nature et beauté de l’observation et de la vision.

Les mots voir et vision chez Krishnamurti sont équivalents. Écouter, observer, comprendre, prendre conscience de, percevoir ont également le sens de voir, voir complètement et totalement
Pour Krishnamurti voir est essentiel. Voir est une affaire d’attention. Seule l’inattention donne naissance à un problème. Il est important de comprendre la nature et la beauté de l’observation, de la vision.

Tant que l’esprit est déformé par des impressions, des sentiments frôlant des névroses, par la peur, la tristesse, le souci, la santé, l’ambition, le snobisme, la recherche de puissance, il est incapable d’écouter, d’observer, de voir. C’est un point de connaissance qu’il nous faudrait approfondir. Non seulement verbalement mais intérieurement et profondément.

C’est le programme que préconise Krishnamurti: « Toujours nous voyons les choses partiellement, dit-il. D’abord parce que nous sommes inattentifs, secondement parce que nous les regardons à partir de nos préjugés, d’images verbales et psychologiques accompagnant ce que nous voyons. Jamais nous n’observons quoique ce soit d’une façon complète.

C’est chose ardue que de regarder objectivement même la nature. Regarder une fleur sans qu’il n’y ait aucune image, aucune notion botanique, simplement l’observer. Cela devient assez difficile parce que notre esprit vagabonde et ne s’intéresse à rien. Et même s’il s’intéresse, il contemple la fleur avec certaines appréciations, certaines descriptions verbales qui donnent à l’observateur le sentiment d’avoir vraiment regardé. Regarder de propos délibéré, c’est ne pas regarder. Donc jamais nous ne voyons la fleur, nous la voyons seulement à travers son image. »

Cependant il nous est plus facile d’observer quelque chose qui ne nous touche pas profondément. Quant à nous observer nous-mêmes sans l’image, l’image qui est le passé, qui est faite de notre expérience et de notre savoir accumulé, cela ne nous arrive que bien rarement. Nous avons de nous-mêmes une image. Nous nous figurons devoir faire ceci et non cela. Nous avons construit de nous-mêmes une image préconçue et c’est à travers elle que nous nous contemplons. Cette façon de voir les choses n’est pas bien sûr constante.
Krishnamurti nous dit: « Le triomphe du passé, le triomphe du modèle : alors voir devient devoir ou vouloir. N’est-ce pas? ».

Extrait d’un texte sur Krishnamurti – Inconnu – Internet –

http://decouvertetcheminement.blogspot.com/


Fév 24 2021

« L’effort, c’est ce qui nous distrait de ce qui est. » -Krishnamurti

EffortLa réalité ne peut pas avoir lieu si vous êtes dans un état de devenir , de conflit ; elle ne vient que là où se trouve un état d’ être , une compréhension de ce qui est . Vous verrez alors que la réalité n’est pas dans le lointain; l’inconnu n’est pas loin de nous : il est dans ce qui est . De même que la réponse à un problème est dans le problème, la réalité est dans ce qui est . Si nous pouvons le comprendre, nous saurons ce qu’est la vérité.

L’effort n’implique-t-il pas que l’on cherche à tout prix à changer ce qui est en ce qu’il n’est pas, ou en ce qu’il devrait être, ou en ce qu’il devrait devenir ? Nous ne cessons de fuir ce qui est , tout en voulant le transformer ou le modifier. Celui qui est réellement satisfait est celui qui comprend ce qui est , qui donne à ce qui est son juste sens. Le contentement véritable ne réside pas dans la pénurie ou l’abondance de nos possessions, mais dans la compréhension de la pleine signification de ce qui est .

L’effort, c’est ce qui nous distrait de ce qui est.

C’est lorsqu’on admet ce qui est que cessent les efforts. Il n’y a pas d’acceptation de ce qui est s’il y a désir de le transformer ou de le modifier. Et les efforts – qui sont signes de destruction – persisteront tant qu’existera le désir de changer ce qui est.

N’est-il pas possible de vivre en ce monde, sans ambition, en étant simplement ce que vous êtes ? Si vous commencez à comprendre ce que vous êtes sans essayer d’y rien changer, alors ce que vous êtes fera l’objet d’une transformation. Je crois possible de vivre en ce monde de manière anonyme, en étant un parfait inconnu, ni célèbre, ni ambitieux, ni cruel.

J. Krishnamurti


Fév 21 2021

Krishnamurti – Lettre sur la liberté

Bonjour,

Je ne vous connais pas, ni votre œuvre… Je me sens tellement prisonnière… de mes pensées, de mon affectivité, de mes manques… Je voudrais au minimum savoir ce que je cherche… désespérément… et d’autant plus désespérément que j’ignore ce que je cherche vraiment.Comment trouver la liberté? Notre personnalité, nos choix, découlent bien souvent des conditionnements subis dans l’enfance… comment quelqu’un peut-il, par exemple, avoir confiance en lui quand tout son conditionnement antérieur a été de ne pas avoir confiance en lui? Plus je vieillis, plus je réalise que c’est l’affectif qui fait agir les hommes, pas la réflexion, et qu’ils ne sont pas responsables de cet affectif; dans toutes les relations, professionnelles, privées, des réactions, des interprétations affectives viennent troubler l’objectivité… la liberté signifie qu’il y a choix… beaucoup n’ont pas le choix (celui qui lutte pour sa survie, l’enfant qui meurt à 2 ans… quel est leur choix?)… le fait de penser n’est-il pas déjà une entrave à la liberté d’exister, tout simplement, comme un animal qui fait partie de la nature… l’homme est extérieur à la nature, il n’est pas dedans, il la regarde… quel choix a-t-il? La liberté de l’homme c’est quoi? La seule liberté que l’on ait, c’est de vivre avec tous nos conditionnements, certains en étant plus conscients que d’autres. Et en prendre conscience, ce n’est pas pour autant s’en libérer. Lire la suite


Fév 20 2021

André Moreau : sur le bonheur

André MoreauEn conférence, ses thématiques et son langage coloré se rapprochent de U.G. Krishnamurti et de Nisargadatta Maharaj. André Moreau est un hédoniste avec de la profondeur. Étant un moniste dans la tradition de la non-dualité, il ne se sent pas séparé.

L’effort est le signe de l’erreur

La confiance va rarement du côté de l’effort mais vers la facilité organisée. Le naturel ou le vrai s’accomplit sans effort. Contrairement à une certaine mentalité populaire, les grandes choses se font toujours facilement. La créativité est une énergie sauvage qu’il faut apprendre à reconnaitre. Il faudrait pouvoir la mobiliser en temps voulu. L’infini ne se laisse saisir que par les audacieux.

Docteur en philosophie de la Sorbonne (1966), auteur de plusieurs traités, André Moreau a été progressivement écarté des milieux universitaires à cause de l’originalité troublante de sa pensée. Son érudition, son sens de l’humour et sa capacité à surprendre ne laissent pas indifférent, d’autant plus que son oeuvre écrite de 47 ouvrages intrigue et séduit à la fois.

En conférence, ses thématiques et son langage coloré se rapprochent de U.G. Krishnamurti et de Nisargadatta Maharaj. André Moreau est un hédoniste avec de la profondeur. étant un moniste dans la tradition de la non-dualité, il ne se sent pas séparé.

Article paru dans l’Originel Magazine du 10 octobre 2007 par Claire Mercier

Prochaine conférence « Invité de Marc » : Clés pour sortir de l’hypnose collective le jeudi 8 septembre 2011 @ 19h30


Fév 9 2021

Des yeux pour voir

L’art de voir est la seule vérité. (J.Krishnamurti)

Je ne désire pas ajouter aux nombreux systèmes existants de nouvelles théories, de nouvelles formules, ou de savantes explications.

Toutes les formules «toutes faites», les «explications», les «théories» ne sont que des moyens habiles pour vous évader de vos propres conflits.

La plupart des esprits désirent imiter, suivre, copier parce qu’ils ne savent plus penser fondamentalement par eux-mêmes.

Pour la plupart la douleur, le conflit est si intense, qu’ils préfèrent plutôt s’évader dans les religions, les systèmes, les théories, ces cristallisations de la pensée humaine. Lire la suite


Fév 8 2021

Résister, c’est créer – Krishnamurti


Fév 6 2021

Entrevue avec Charles Antoni, fondateur de la maison d’édition L’Originel

Je vous invites à visionner cette magnifique entrevue réalisé par Paul-André Jetté de Réseau Vox Populi. De nombreux thèmes sont abordés dans les livres de Charles Antoni, tels que le développement personnel, la non-dualité, les philosophies de l’éveil, la Corse, l’enseignement soufi, Gurdjieff, la littérature, le yoga, la santé et le bien-être.


Jan 23 2021

Krishnamurti L’intérêt de la méditation : une société juste

Le miracle de l’attention. C’est le premier des propos de Krishnamurti dans cet ouvrage paru chez Stock qui s’intitule : Cette lumière en nous : la vraie méditation. J’ai eu la tentation de vous dire avant de commencer : un autre qui ne sera pas facile à suivre. Il faut avouer que Krishnamurti constitue un cas très particulier.

Le cheminement de Krishnamurti et son message

Krishnamurti
Quand il était jeune homme, il a été adopté par la Société Théosophique, en Inde. C’était un jeune homme très brillant, très beau aussi, qui était appelé à devenir le leader de ce mouvement dans le monde. C’était un peu comme le Messie, à un moment. Ce qui est étonnant, c’est que malgré sa formation théosophique, ses études à Londres, occidentalisées en même temps que conservant ses racines orientales, il ait eu la force, à un moment, de renoncer officiellement à son rôle de messie, de se détacher de ses tuteurs et de la théosophie.  » La vérité est un pays sans chemins, dit-il. Il n’existe pas de sentier qui y conduise, ni de religion ni de secte. Tel est mon point de vue que je défends absolument et inconditionnellement. La vérité ne connaît pas de limites, elle ne peut être conditionnée. Elle ne peut être atteinte par des voies prédéfinies et ne peut donc pas non plus être organisée. C’est pourquoi il ne faudrait pas fonder des organisations qui conduisent les humains sur un chemin particulier ou les obligent à l’emprunter. Si seulement cinq personnes veulent écouter, vivre, tourner leur visage vers l’éternité, cela suffit. Comme je l’ai dit, je n’ai qu’un seul but : libérer l’homme, lui donner l’impulsion pour qu’il se libère lui-même.  »

Voilà en gros le message de Krishnamurti : il va falloir que vous le fassiez vous-même. Vous êtes votre propre gourou mais encore faut-il que vous en preniez conscience, que vous soyez à l’écoute, etc.
L’attention totale

KRISHNAMURTI.
Cette lumière en nous :
la vraie méditation,
Éd. Stock,
1999

Par opposition à la distraction, puis au vacarme du mental qui parle tout le temps comme un imbécile dans notre tête (la mienne en tous les cas), l’attention totale constitue le moyen d’en venir à bout .  » Êtes-vous attentif à ce que dit l’orateur en ce moment même?, demande Krishnamurti lors d’une conférence. Ou écoutez-vous en ayant l’esprit prompt à la comparaison […]? L’attention, c’est autre chose, n’est-ce pas? Mais si votre attention implique votre être tout entier – votre corps, vos nerfs, vos yeux, vos oreilles et votre esprit – il n’existe plus alors de centre à partir duquel rayonne l’attention – il n’y a plus que l’attention pure. Et cette attention est silence absolu. Écoutez-moi bien! dit-il. Car personne d’autre ne vous tiendra de tels propos, malheureusement, alors de grâce soyez pleinement attentif […]  »

 » La vertu, c’est l’ordre, dit-il plus loin, et l’ordre ne peut être compris que lorsqu’on a exploré à fond le désordre qui règne en soi. Nous menons, il est vrai, des vies désordonnées : c’est un fait. Le désordre, ce sont les contradictions, la confusion, la diversité des désirs péremptoires, les actes démentant les paroles, les idéaux auxquels on s’accroche, et le clivage entre soi-même et ses idéaux. Le désordre, c’est tout cela, et lorsque vous en prenez conscience et que vous y accordez votre attention pleine et entière, cette attention fait éclore l’ordre, c’est-à-dire la vertu – qui est quelque chose de vivant, que nul artifice, nulle pratique n’ont jamais défigurée.
 » La méditation est nécessaire à la compréhension même de notre existence quotidienne.  »
 » La méditation vécue au quotidien n’est autre que la transformation de l’esprit, c’est une révolution psychologique qui fait que l’existence quotidienne telle que nous la vivons […] est pleine de compassion, d’amour, et de l’énergie nécessaire pour transcender toute forme de médiocrité, de petitesse, de superficialité. Quand l’esprit se tait – qu’il est réellement silencieux, mais pas de manière forcée, sous la contrainte d’un désir, d’un vouloir – il naît alors un mouvement d’un tout autre genre qui n’est pas de l’ordre du temps. […] » La méditation est nécessaire à la compréhension même de notre existence quotidienne. Cela veut dire qu’il vous faut être totalement attentif à ce que vous faites, à votre façon de vous adresser aux autres, à votre façon de marcher  Méditer en marchant, de penser, à ce qui fait l’objet de vos pensées : prêtez attention à tout cela fait partie intégrante de la méditation « , écrit Krishnamurti.
Pour une société juste
 » La condition indispensable est la méditation « , nous dit Krishnamurti.      » Pourquoi l’homme n’a-t-il pas su changer? Car il change très peu, de façon marginale, tout en exigeant par ailleurs une société meilleure. Il veut que l’ordre règne, non seulement en lui-même et dans ses relations – intimes ou autres –, mais il veut aussi voir régner dans le monde une certaine paix, il veut avoir le loisir de s’épanouir, d’accéder à une certaine forme de félicité. […]

 » Notre planète n’a jamais connu d’époque exempte de guerres, de tueries, d’anéantissement réciproque – une religion en détruisant une autre, une institution en dominant une autre pour mieux l’éliminer […]. Conscients comme vous l’êtes de ce conflit sans fin, ne vous demandez-vous jamais s’il est possible de vivre dans cet univers sans chercher à fuir au sein d’une communauté, sans se faire moine ou ermite, mais d’y vivre d’une manière saine, heureuse, intelligente, sans le moindre conflit intérieur ou extérieur? Si vous vous posez la question – et vous le faites, j’espère en ce moment même, car nous menons ensemble cette réflexion –, alors que vous êtes en droit d’exiger l’avènement d’une société juste « , dit-il.  » Cet immense chaos, cet immense désordre qui règne dans le monde entier, met en danger toute forme de vie. Il gagne du terrain de toutes parts. C’est pourquoi tout être qui se livre à une observation sérieuse de lui-même et du monde se pose nécessairement ces questions. Les scientifiques, les hommes politiques, les philosophes, les psychanalystes, les gourous – qu’ils soient originaires de l’Inde, du Tibet ou de chez vous – n’ont pas résolu les problèmes qui nous assaillent en tant qu’être humain; ils ont émis toutes sortes de théories mais n’ont pas résolu les problèmes. Personne ne le fera à notre place : c’est à nous qu’il incombe de résoudre nous-mêmes ces problèmes, parce que c’est nous qui en sommes la cause. Mais malheureusement nous n’avons pas envie de regarder de près nos propres problèmes, de les creuser, et de découvrir pourquoi nous vivons en égoïstes obnubilés par notre propre ego. […]
 » Sur le plan psychologique, vous êtes le monde et le monde c’est vous.  »     » Sommes-nous prêts à approfondir le problème de la connaissance de soi? Car chacun d’entre nous est le monde? Les êtres humains, partout dans le monde, et quelle que soit leur couleur, leur religion, leur nationalité, leurs croyances, souffrent psychologiquement au plus profond d’eux-mêmes. Ils passent par des angoisses terribles et une solitude extrême, par d’immenses désespoirs, par des dépressions profondes, et ils ont l’impression que la vie qu’ils mènent n’a pas de sens. Psychologiquement parlant, les hommes sont les mêmes aux quatre coins du monde. C’est une réalité, une vérité, un fait avéré. Donc, sur le plan psychologique, vous êtes le monde et le monde c’est vous. Et lorsque vous comprenez ce que vous êtes, c’est l’ensemble de la structure humaine que vous comprenez. Il ne s’agit pas d’une simple investigation nombriliste, car lorsque vous vous connaissez vous-même et que vous vous transcendez, une nouvelle dimension voit le jour.

 » Qu’est-ce qui pourrait nous faire changer? D’autres chocs? D’autres catastrophes? Des formes de gouvernement différentes? Des images différentes? D’autres idéaux? Tout cela, vous l’avez largement expérimenté et pourtant vous n’avez pas changé. Plus notre éducation devient sophistiquée, plus nous devenons ‘ civilisés ’ – c’est-à-dire de plus en plus éloignés de la nature – plus nous devenons humains. Que faut-il faire dans ce cas? Puisque rien d’extérieur à nous-mêmes ne viendra à notre secours – pas même les dieux –, il devient alors évident que je dois compter sur moi seul pour me connaître moi-même. Je dois avoir une vision lucide de ce que je suis et me transformer radicalement. De cette mutation jaillit alors le bien. Et une société juste peut alors se créer. «  » La condition indispensable est la méditation, nous dit Krishnamurti. – Dans le sens où il l’entend, c’est une attitude beaucoup plus qu’une technique qui nous permettrait de créer cette société juste. – Ce terme de méditation – comme celui d’amour – a été galvaudé, traîné dans la boue. Ce mot est pourtant si beau, si chargé de sens. Il a tant de beauté – pas dans le mot en soi mais dans le sens dont il est porteur. Nous allons vérifier nous-mêmes s’il nous est possible d’accéder à cet état où l’esprit est en perpétuelle méditation. Mais pour donner à cet esprit des bases solides, il faut comprendre ce que signifie l’existence – ce qu’il en est de la vie et de la mort. Comprendre la vie et la portée extraordinaire de la mort : c’est cela, la méditation, et non la quête de quelque expérience mystique intense, ni la répétition constante d’un chapelet de mots – si saints, si anciens ces mots-là soient-ils.  »

Assez étonnant ces propos de Krishnamurti.

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Par 4 chemins/ Le 4 février  2001/3e heure
Micro : Jacques Languirand/ Transcription : Noëllise Turgeon/
Édition : Stéphanie Adam Le Roch/ Révision : Nicole Dumais
Documentation : Rosalie Dumontier /Infographie : Pascal Languirand
© 2000 Productions Minos Ltée./ Tous droits réservés pour tous pays.
    http://www.radio-canada.ca


Jan 19 2021

Une manière d’agir totalement différente

Krishnamurti - portrait

Krishnamurti

Il ne s’agit pas ici d’une propagande idéologique, ni d’une forme de croyance, ni de conclusions d’ordre philosophique, ni d’une religion dans l’acception communément admise du terme. Nous observons ce qui se passe dans le monde. Il ne s’agit pas d’un point de vue personnel mis en avant par l’orateur ; c’est ensemble que nous observons lucidement — sans aucun préjugé, sans nous identifier à une portion spécifique de l’univers, ni à aucune croyance, à aucun dogme religieux — nous observons donc l’extrême violence à l’oeuvre dans le monde : les guerres, la menace de la bombe atomique, les dissensions religieuses, les divisions nationalistes avec leur panoplie d’armements. L’univers dans lequel nous vivons est un univers dangereux, et la plupart des gens ne se rendent pas compte, je le crains, de l’immense dégradation, de l’immense dégénérescence en marche dans le monde entier. Et nous nous efforçons d’appliquer à ces problèmes des solutions politiques, économiques, sociales ou évangéliques — ce qui, bien entendu, ne fait qu’accroître encore la confusion, la séparation, la division et donc le confit.

Ce ne sont ni la politique, ni les religions en place, ni l’accumulation de connaissances scientifiques qui vont résoudre nos problèmes — pas plus que les psychologues, les prêtres, les spécialistes. La crise, elle est dans notre conscience, c’est-à-dire dans notre esprit, dans la manière que nous avons de considérer le monde sous un angle étriqué et limité. C’est là qu’est la crise. L’esprit humain a évolué sur des millions et des millions d’années, il est conditionné par le temps et l’évolution. Un esprit conditionné de la sorte, avec la conscience étroite, limitée, exclusive qui est la sienne — considérant la crise qu’il traverse dans le monde actuel — peut-il jamais être changé ? Peut-il amener un changement radical au sein de ce conditionnement ? Lire la suite


Jan 18 2021

Convergences du Ch’an & de la pensée de Krishnamurti

Le Ch’an et Krishnamurti conseillent de s’affranchir de la tyrannie des besoins matériels et des attentes spirituelles.

« Nous sommes, dit Krishnamurti, pour la plupart, riches de tout ce que produit la société, de tout ce qu’elle a créé en nous et de ce que nous avons créé en nous-mêmes : riches en avidité, envie, colère, haine, jalousie, angoisse. En cela nous sommes très riches. Des religions, à travers le monde, ont prêché la pauvreté. Le moine revêt sa robe, change de nom, se rase la tête, entre dans une cellule et fait vœu de pauvreté et de chasteté. En Orient il ne dispose que d’un pagne, d’une robe, d’un repas par jour, et nous respectons cette pauvreté. Mais ceux qui l’ont assumée sont encore, intérieurement, riches de tous les produits de la société, car ils recherchent une situation, un prestige. Appartenant à tel ou tel ordre, à telle ou telle religion, ils vivent toujours dans ce qui divise et sépare les cultures et les traditions. Ce n’est pas cela la pauvreté, car elle consiste à être totalement libre par rapport à la société, encore que l’on puisse avoir quelques vêtements de plus et consommer quelques repas de plus. Grand Dieu, qui en fait cas ? Mais, malheureusement, beaucoup de personnes sont avides de ce genre d’exhibitionnisme.

La pauvreté devient une chose merveilleuse quand on s’est libéré psychologiquement de la société. On devient pauvre intérieurement car on n’a plus rien du tout dans l’esprit, ni recherches, ni exigences, ni désirs : rien. Ce n’est que cette pauvreté intérieure qui peut percevoir la vérité d’une vie en laquelle n’existe aucun conflit. Une telle vie est une bénédiction qu’aucune église, qu’aucun temple ne peuvent donner. »

Le Ch’an et Krishnamurti s’élèvent contre l’autorité spirituelle (« Ne met pas de tête au-dessus de la tienne », disait le troisième patriarche du Ch’an, Seng-T’san.) et dénoncent l’attachement aux textes (Un maître Ch’an recommande : « Si vous êtes bouleversé par le soutra, bouleversez plutôt le soutra vous-même »).

Le Ch’an et la pensée krishnamurtienne ne peuvent être considérés comme des systèmes d’idées, ni comme des métaphysiques.

Tous deux n’ont ni dogmes, ni croyances, ni symboles grossiers ou subtils, ni rituels, ni temples, ni disciplines, ni principes.

Tous deux sont non-traditionalistes, non-conformistes. Il n’y a pour le Ch’an et pour Krishnamurti, aucun intermédiaire entre l’homme et l’Univers, ni mérites à acquérir.

Il n’y a pour l’un comme pour l’autre aucune « voie ». (Il n’y a pas de voie puisque nous sommes nous-mêmes la Réalité, nous dit le Ch’an). Krishnamurti développe exactement le même point de vue dans un ouvrage au titre significatif « La Réalité sans Voie ».

Krisnamurti et le Ch’an insistent tout deux sur le fait fondamental que nous n’avons rien à faire, nous n’avons pas d’édifice spirituel à construire.

Nous n’avons pas à « devenir » quelque chose d’autre mais à prendre conscience de ce que nous sommes.

S’affranchir de l’autorité et trouver en soi la docte Inconnaissance

« En vue de rejeter l’autorité (je parle de l’autorité psychologique, pas celle de la loi), en vue de dénier toute autorité aux organisations religieuses, aux traditions, à l’expérience, on doit voir pourquoi l’on a une tendance habituelle à obéir, et l’on doit étudier ce penchant. Pour ce faire, on doit se libérer de tout ce qui est condamnation, opinion, acceptation. Il est impossible d’accepter l’autorité tout en l’étudiant. Pour étudier en nous-mêmes toute la structure psychologique de l’autorité, nous devons en être dégagés. Cette étude comporte une négation de toute cette structure, et lorsque nous la nions, cette action est la lumière de l’esprit qui s’est libérée de l’autorité. Nier, dans ce domaine, tout ce à quoi on a attribué de la valeur, la discipline imposée, les maîtres, l’idéalisme, c’est les étudier, et cette action n’est pas seulement discipline, mais sa négation, qui est un acte positif. Nous nions ainsi tout ce qui a été considéré important en vue de provoquer ce silence de la pensée.

Nous voyons donc que dominer la pensée ne la rend pas calme et paisible. Avoir l’esprit tellement absorbé par son sujet qu’il s’y perd, n’est pas non plus un état de silence. L’enfant à qui on donne un jouet qui l’intéresse s’y absorbe et devient très calme. Mais lorsqu’on lui retire le jouet, il redevient turbulent. Nous tous avons nos jouets qui nous absorbent et nous nous imaginons être très tranquilles, mais on peut se dédier à une activité, scientifique, littéraire ou autre, sans pour autant, être du tout dans un état de silence.

Le seul silence que nous connaissions est celui qui se produit lorsqu’un bruit s’arrête. Ce n’est pas cela, le silence. C’est comme la beauté, comme l’amour, quelque chose de tout différent. Ce n’est pas le produit d’un esprit au repos. Ce n’est pas l’effet d’un arrêt de certaines cellules cérébrales, lorsque ayant compris tout le processus de l’agitation, elles en ont assez et veulent qu’il se taise, car alors ce sont elles, les cellules, qui produisent un silence. Ce n’est pas la conséquence d’un état d’attention où l’observateur est observé : là, il n’y a plus de frottements, mais ce n’est pas le silence.

Vous attendez que je vous dise ce qu’est ce silence, afin de le comparer à ce que vous pouvez en penser, de le traduire, de l’emporter et de l’enterrer. Il ne peut pas être décrit. Ce qui peut se décrire n’est jamais que du connu, et l’on ne peut se délivrer du connu qu’en mourant chaque jour à lui, aux blessures, aux flatteries, à toutes les images que l’on avait formées, à toute l’expérience ; qu’en mourant chaque jour, afin que les cellules du cerveau redeviennent fraîches, jeunes, innocentes. Mais cette innocence, cette fraîcheur, cette qualité de gentillesse et de tendresse n’engendrent pas l’amour. Cette qualité n’est pas celle de la beauté ou du silence.

Ce silence-là, qui n’est pas celui où s’arrête un bruit, n’est encore qu’un petit début, comme si l’on passait par un petit trou vers l’énorme, l’immense étendue de l’océan, vers un état immesurable, intemporel. Mais cela, vous ne pouvez pas le comprendre verbalement si vous n’avez pas compris toute la structure de la conscience, la signification du plaisir, de la douleur, du désespoir et si vos cellules cérébrales ne se sont pas mises d’elles-mêmes au repos. Alors, peut-être, rencontrerez-vous le mystère que personne ne peut vous révéler et que rien ne peut détruire. Un esprit vivant est un esprit silencieux qui n’a pas de centre et, par conséquent, ni espace ni temps. Un tel esprit est sans limites, et c’est la seule vérité, la seule réalité. »

Krishnamurti

Sources :
« Se libérer du connu », Krishnamurti, éditions Stock.
« Bouddhisme, taoïsme et zen », Robert Linssen, Le Courrier du Livre.
http://bouddhanar.blogspot.com